Eldor@do : Commémor@tion rom@nesque

En 2006, Laurent Gaudé publie le roman Eldorado qui croise deux histoires. D’une part l’histoire de Salvatore Piracci, un garde-côte sicilien chargé de surveiller les embarcations amenant illégalement des immigrés clandestins sur l’île de Lampedusa. D’autre part l’histoire de Soleiman, un jeune Soudanais qui traverse l’Afrique du Nord pour tenter de rejoindre l’Europe.

En 2023, les étudiantes et étudiants PPPE entreprennent une commémoration numérique autour de ce roman. A travers ce travail d’écriture d’appropriation, il s’agit de « célébrer » les 2 personnages principaux du roman en fixant dans notre mémoire les traces de leur parcours et de notre lecture. Il s’agit aussi de « célébrer » celles et ceux qui depuis des décennies tentent de traverser la mer Méditerranée pour trouver refuge en Europe et si souvent y disparaissent, engloutis à jamais. Cette commémoration engage la question des droits humains, donc les valeurs que l’École est censée transmettre, donc aussi notre future mission d’enseignant·es.

La question des lieux de mémoire est aussi soulevée par des artistes contemporains qui érigent des œuvres sanctuaires à la mémoire des migrants disparus : « Les anges inconscients », une sculpture grandeur nature de Timothy Schmalz inaugurée place Saint-Pierre en 2019, « Muséo Atlantico », près de 250 sculptures de James deCaires Taylor immergées au large des Canaries …

Et si nous essayions à notre tour d’ériger des « stèles » pour garder le souvenir de ces migrants ?

Et si nous tentions de collecter et fixer les traces de leur passage et de leur existence ?

Et si nous le faisions à notre manière et sur nos supports : numériques ?

Il va ainsi s’agir de recréer numériquement les traces des personnages en recréant leurs traces numériques. Ce travail doit permettre de faire voir la traçabilité qui est désormais notre destin dans nos existences numérisées, mais aussi de transformer les traces numériques en signes de vie et gestes de mémoire. Cela suppose de les choisir, fixer, penser, agencer pour leur donner forme et sens. Cela suppose de transformer la conservation, subie, en mémoire au travail. Cela nous invite aussi, en creux, à éditorialiser nos propres traces pour retrouver un peu de pouvoir d’agir.

D’où notre mission : convertir les données (collectées, instrumentalisées) en souvenirs (sélectionnés, designés, partagés), subvertir le data center pour le transformer en mémorial.

Propositions de memorabilia numériques :

  • Trace Réseau social = trace visuelle = selfie intérieur. Consigne : Produire une photo ou un dessin qui constituera un autoportrait symbolique du personnage à un moment précis du roman.
  • Trace Cellulaire = trace vocale = mémo-monologue. Consigne : au cours du voyage, le personnage a enregistré sur son smartphone un mémo audio où il livre ses sentiments, pensées, aspirations …
  • Trace Application de streaming = trace musicale = playlist de voyage. Consigne : proposer une série de morceaux de musique qui pourraient accompagner et jalonner le parcours du personnage
  • Trace Géolocalisation = trace spatiale = cartographie du voyage. Consigne : Sur une carte uMap, reconstituer le voyage du personnage à travers des marqueurs-étapes.
  • Trace boite mail = trace écrite = le dernier courriel. Consigne : Vous avez retrouvé sur la boite de messagerie du personnage un mail écrit par le héros à la fin de son parcours romanesque. Il livre ses sentiments et réflexions sur certains épisodes ou sur d’autres personnages rencontrés. Il éclaire les leçons qu’il tire de son voyage et le sens qu’il donne au mot « Eldorado »

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